Quand te reverrais-je… – #18 – 2012
Dimanche, 17h.
La nuit est tombée, je sort d’une heure de sauna.
Le corps sain et la tête fraîche, je m’attaque à la page blanche.
Mon départ de Vancouver approche à grands pas, et je fais donc tout mon possible en ce moment pour réussir mon prochain projet, à savoir de vivre quelques temps dans une station de ski.
Je vais essayer un peu partout, mais le plus simple serait évidemment de trouver un job à Whistler, station très proche de Vancouver et qui est la plus grande d’Amérique du Nord. Il y a donc plus de travail, mais en même temps ça attire aussi beaucoup plus de candidats…
Ayant vu qu’il y a un restaurant Earls à Whistler, j’ai essayé par tous les moyens de rentrer en contact avec eux pour essayer de me vendre. Vu que je bosse déjà dans un Earls, et que je n’ai pas peur qu’ils appellent mes responsables actuels car je sais que je fait du bon taf, il devrait avoir moyen que cela se passe bien.
Mais j’ai assez galéré pour trouver un contact. Car sur le site officiel d’Earls, on a accès au descriptif de tous les restaurants mais sans aucun email ou téléphone. Idem pour l’intranet, où j’ai accès étant salarié.
Je me résous donc à rechercher la page facebook du Earls Whistler (sachant déjà que chaque restaurant a sa propre page), je la trouve, et j’envoie un message privé à cette page, ne sachant pas sur qui j’allais tomber ou si même j’allais avoir une réponse.
A ma grande surprise, quelques heures après je reçois une réponse du directeur marketing, qui me donne 2 emails des Chefs cuisiniers de Whistler ! Je m’empresse donc d’envoyer une petite bafouille bien sentie qui les caresse dans le sens du poil comme je sais les faire, et le lendemain j’ai une réponse.
Un des Chefs me dit qu’il est toujours content de prendre du personnel qui est déjà de la maison. Qu’il préférerait qu’on se rencontre mi décembre, car c’est à cette date qu’ils font le planning pour les fêtes, mais que si j’arrive plus tard, il essayera quand même de me trouver une place.
Il n’y a donc encore rien de fait, mais c’est assez positif ! Je vais revenir à la charge bientôt pour avoir une confirmation plus ferme, sachant que j’ai une nouvelle carte entre les mains.
En effet, comme me l’avait dit un de mes collègues après quelques semaines de boulot, si je continuais à bosser aussi vite et bien, « tu vas vite quitter la plonge pour les fourneaux ». Et il ne me mentait pas !
Quelques jours après avoir envoyé mon email au Earls Whistler, un de mes boss au restaurant m’invite un soir de boulot à un petit tête à tête de 5 minutes pour faire un point avec moi.
Il m’indique qu’ils sont très content de mon travail, et que si je le désire ils sont prêt à me former à un poste en cuisine.
Moi je lui signale que je suis très intéressé, mais je lui évoque aussi mon souhait de partir bientôt.
Ca l’a bien embêté, et il essaya par tous les moyens de me faire changer d’avis, en me disant que mon salaire serait meilleur, et que j’aurais plus d’heures (m’étant plaint de ne pas en avoir assez). Ce fut dur de dire non, car avec une petite formation en cuisine il serait plus facile de trouver des petits boulots dans le futur, mais je ne peux clairement pas rester 2 ou 3 mois de plus à Vancouver. Ma tête est ailleurs.
S’ils sont donc prêt à me former en cuisine, ça ne peut qu’être un point positif en plus pour me vendre au Earls Whistler.
Comme je viens de l’évoquer, j’ai eu très peu d’heures de boulot à Earls ces dernières semaines. Je ne bossais que 2 ou 3 jours par semaine. Bien insuffisant pour payer mon loyer.
J’ai donc recherché un autre part time activement, mais sans succès.
Même pour de la plonge, or que j’ai de l’expérience !
J’ai eu un entretien dans le quartier de Kitsilano pour de la plonge. J’ai été contacté au téléphone par un jeune Chef, qui n’est autre que…français. L’entretien se passe bien mais il a mal lu mon resume, lui cherchait quelqu’un pour un full time, pas pour un part time.
Deuxième entretien une semaine plus tard, qui du début à la fin a été complètement barré !
Un dimanche on m’appel, et autant j’ai fait des progrès en compréhension au téléphone, mais là la liaison est super mauvaise, et je n’arrive pas à comprendre grand chose. Même pas de quel restaurant il s’agit.
Mon interlocuteur me demande pour quel poste je postule, je lui indique dishwasher, lui veut un cuisinier, mais malgré que je n’ai pas d’expérience il veut quand même me rencontrer la semaine prochaine. Bon ba ok, qu’est-ce que j’ai à perdre ?
Je note l’adresse du mieux que je la comprend, c’est dans le quartier chicos West Point Grey, au Royal Vancouver Yacht Club. Bon rien qu’au nom vous aurez compris que ce n’est pas n’importe qui qui est membre de ce club, qui se situe au bord de la mer.
Je me rend au rendez-vous, je me présente à la réception, je n’étais pas dans leurs fiches. La réceptionniste prévient la cuisine, idem, aucun rendez-vous de prévu ce jour là. Je vois donc débarquer la Chef ou la Sous-Chef. La Quarantaine, aimable comme une porte de prison. N’ayant pas compris le nom de mon interlocuteur au téléphone, je ne sais pas qui demander. Elle, qui se demande encore sur qui elle est tombé, m’invite quand même dans la cuisine pour un petit entretien.
Elle recherche mon email où j’ai répondu à l’annonce sur son ordinateur, mais impossible de le trouver. Je commence à me dire que je ne dois pas être à la bonne adresse, et que je me suis embarqué dans une belle galère !
Pas grave, en attendant l’arrivé du Chef, elle commence l’entretient.
Car ici ils recherchent bien quelqu’un, un cuisinier, mais un cuisinier expérimenté. Elle s’aperçoit donc vite sur mon resume que je n’ai pas du tout le profil. Je commence à lui faire comprendre que ce n’est pas grave, que c’est moi qui ai du sûrement faire une erreur, et c’est alors que le Chef arrive.
La quarantaine également, un peu plus grand que moi, de larges épaules, de larges mains, et inconsciemment je ressent comme un air familier. Sa collègue lui fait un rapide résumé de la situation, et lui précise que je suis français.
C’est alors qu’il me dit, en français dans le texte, que lui aussi est français (décidément !). Il me demande aussitôt d’où je viens, je lui dis du Havre, et lui de me répondre « ah ba moi aussi je suis normand ». Je bloque une seconde, et laisse échapper un léger soupir en lieu et place d’un rire tellement la situation commence à être cocasse !
A cet instant, l’entretien a pris une autre tournure. J’ai senti qu’il a du se passer dans sa tête quelque chose de l’ordre de « bon il est jeune, français, normand, on va essayer de l’aider le gamin ».
Il a donc fait le maximum qu’il a pu faire.
Moi je commençais à lui dire qu’il n’avait pas à sans faire, que je comprenais très bien que je n’ai pas les compétences nécessaires, mais lui réfléchissait, parlait avec sa collègue, et me proposait de bosser pour eux durant les fêtes de fin d’années, car ils auront besoin de monde, même d’un dishwasher.
Même s’il y a peu de chance que je sois encore à Vancouver à ce moment là, j’accepte quand même, ça ne coute rien, et sa collègue me raccompagne à l’accueil, où elle va faire dans le même temps une photocopie de mon resume ainsi que de mon permis de travail.
Elle revient quelques instants plus tard, métamorphosé. Finit la porte de prison, bonjour les sourires et la bonne humeur. Elle a fait plusieurs exemplaires de chaque document, et me donne l’excédent en me disant « tiens, je t’ai aussi fait des copies pour toi, ça pourra te servir. Si je fais ça c’est parque j’aime bien les français ! ».
Là encore j’essaye de garder mon sérieux, j’esquisse juste un sourire et la remercie.
Peut être qu’il y a plus qu’une relation de travail entre ces 2 Chefs, mais ce n’est pas mes oignons !
Je sort du bâtiment, vérifie le numéro, non je suis définitivement bien à la bonne adresse. Je ne m’explique donc pas ce qui vient de se passer, et je n’ai pas reçu de nouvel appel du type que j’avais eu au téléphone.
J’ai dû passer dans la Twilight Zone durant ces 15 minutes, mais c’était bien amusant, ça a fait mon après midi.
Voyant que je n’arrivais pas à trouver de part time, et que le temps jouait contre moi, j’ai du me résigner à recontacter mon agence d’intérim, où j’avais bossé en manutention ma première semaine à Vancouver.
Au final il y a du positif et du négatif (si on passe le fait que de toute façon je n’avais pas le choix).
Le positif, c’est que durant mes missions d’intérims j’ai a parlé beaucoup plus anglais que durant mon boulot à Earls. Il y a beaucoup plus d’interactions avec les responsables, qui doivent t’expliquer le boulot, qui après suivent l’avancement et tu dois leur expliquer également comment ça se passe. En outre, le plus souvent on est plusieurs intérimaires durant les missions, donc on apprend à se connaître, on discute, on mange ensemble, etc… Donc de ce côté là c’est top.
Le négatif, c’est que évidemment, mes horaires à Earls ne sont jamais coordonnés avec les quelques missions d’intérims que je reçois. J’en ai eu ces 2 dernières semaines, et ces 2 dernières semaines je recommence à bosser 5 jours par semaine à Earls…
Ayant un retard de rentré d’argent je n’ai pas le choix, donc je me tape entre 2 ou 3 doubles journées par semaine. Du genre 7h/15h en intérim, et 18h/1h en plonge.
Je me motive en me disant qu’outre le loyer, je dois aussi économiser pour payer les skis et tout ce qui va avec, mais ça reste dur en fin de semaine.
Niveau réjouissances, je m’éclate toujours autant avec Mary, la canadienne avec qui on fait un échange linguistique. Elle me fait tester tous les cafés et les bars de la ville !
Son cerveau va à 200 à l’heure, et ses idées sortent donc dans tous les sens, je l’apprécie vraiment pour l’énergie débordante qu’elle peut avoir.
Elle m’a appris qu’elle a une connaissance sur Toronto, et elle lui a déjà parlé de moi, donc c’est cool, j’aurais quelqu’un pour me faire visiter la ville les premiers jours !
Toronto, avec leur équipe de football US les Argonauts, qui vient tout juste de gagner la finale du championnat Canadien. A la différence des Lions de Vancouver, qui ont échoué durant la finale de la conférence ouest. A laquelle j’ai assisté en compagnie de quelques français !
46$ pour la place la moins chère, j’ai un peu hésité, mais bon on se dit merde, tu ne sais pas quand l’occasion va se reproduire, tu es là pour un an donc fonce. Et au final la saison reprend au Canada que l’été prochain, j’ai donc bien fait.
Je ne savais pas à quoi m’attendre, si j’allais m’ennuyer ou non, sachant par avance que c’est un jeu très haché, avec beaucoup de temps morts. J’avais une bonne connaissance des règles, et cela sans avoir regardé un seul match à la télévision. Je le dois à un geste de bonté de ma mère qui un jour, durant mon très jeune temps, était revenu à la maison avec 2 jeux soldés Super Nintendo. L’un, Jurassic Park, l’autre Troy Aikman NFL Football, un jeu de football US, tout en anglais.
Mais quand on est gamin, ce n’est pas ça qui nous arrête ! Et ce n’est pas le temps libre qui nous manque en même temps. Raah, rien que la jaquette est une immense madeleine de Proust…
Donc après beaucoup de patience, j’ai pu apprendre toutes les subtilités de ce jeu par le biais de ce jeux vidéo, de façon totalement empirique, à l’ancienne. Et oui, pas de manuel en français et encore moins d’Internet à l’époque !
Revenons en donc au match, où les Lions de Vancouver rencontraient les Stampeders de Calgary, pour une place en finale de la Grey Cup. C’était bien fun ! On était assez bien placé, on pouvait avoir une bonne lecture du jeu.
Il y a évidemment pas mal de temps morts entre chaque phase de jeu, mais ce n’est pas si horrible que j’aurais pu le penser, ça se digère assez bien, et le match ne paraît pas une éternité.
Le public est en bloc, tout vêtu d’orange pour l’immense majorité, la couleur des Lions, mais ça n’aura pas suffit. Les Lions se sont pris un touchdown très vite de façon assez bête, et de ce fait ils ont toujours couru après le score sans jamais réussir à renverser la tendance.
C’est sympa à suivre, le seul côté un peu chiant ce sont les sollicitations incessantes de l’organisation par le biais des écrans géants pour que le public fasse du bruit. Sans blaguer par moment c’était toutes les 30 secondes. Bonjour la spontanéité…
Après quelques remarques que j’ai pu recevoir à droite à gauche, si je poste qu’une fois par mois en ce moment c’est que je suis en mode boulot-boulot.
De plus je ne bouge plus toutes les 3 semaines comme par le passé, donc évidemment il y a moins de choses à raconter 🙂
Je comprend et respecte un peu plus maintenant le choix d’un grand nombre de pvtistes qui est de rester 1 an dans la même ville. Pour s’intégrer et évoluer professionnellement, c’est un bon moyen. C’est une autre façon de vivre les choses.
Moi je peux me rendre compte, après un peu plus de 3 mois, je peux prétendre à un meilleur job, et niveau social le boulot m’apporte pleins de nouveaux contacts, qui commencent tous juste à porter leurs fruits, dans le sens où à force de délirer ensemble on pourrait passer à l’étape d’après, se voir en dehors du boulot.
Pour autant je ne regrette pas mon choix. Le pvt, c’est le seul permis qui te permet de voyager et de travailler où tu veux dans le Canada, alors pourquoi s’en priver et se limiter !
C’est un peu le gâcher à mon sens. Pour rester 1 an au même endroit je prendrais plutôt un permis jeune professionnel. Ce dernier vous obligeant à rester l’année entière avec la même entreprise.
Lundi approche à pas de loup…
Allez on se motive pour une nouvelle longue semaine du côté de la cote Pacifique.
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